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25 novembre 2020 |
France

Le secteur du bâtiment a connu ces dernières années une augmentation des non-qualités sur les chantiers. D’ailleurs, selon l’Agence Qualité Construction, la sinistralité dommage/ouvrage s’est située, en 2018, à 782 millions d’euros, soit une hausse de + 6,2 % depuis 2009)1. Ces chiffres représentent l’ensemble des non-qualités (fondation, ossature, réseaux…) et ne concernent pas seulement l’enveloppe du bâtiment. Cependant, de nombreux projets de construction présentent des décalages observés importants entre les performances énergétiques attendues et celles obtenues en phase d’exploitation.

 

Après avoir pointé du doigt dans ses deux derniers communiqués de presse, les aspects à considérer et à approfondir concernant la qualité de l’enveloppe, le Groupe de Travail sur la Qualité de l’Enveloppe (GTQE) s’attache, dans ce 3ème volet, à proposer des perspectives pour tendre vers une 

enveloppe de qualité et ce, notamment au travers de la méthode dite du « commissioning », de l’apport du numérique et de l’automatisation des mesures et des vérifications.

 

Le commissioning, un suivi de qualité depuis la programmation jusqu’à l’exploitation

Le commissioning d’un bâtiment peut être compris comme une démarche de qualité globale qui a pour objectif de garantir la conformité des performances du bâtiment avec les documents contractuels. Il se différencie de la notion de « commissionnement » qui consiste en une mission partielle d’assistance et d’aide à la mise en service des équipements. L’approche anglo-saxonne le définit d’ailleurs comme un outil de management complet de la qualité, qui a pour objectif d’éviter un trop grand décalage entre les objectifs fixés en amont, les moyens mobilisables et les résultats obtenus. De plus, il s’avère nécessaire de dépasser la seule cible d’un chiffre de consommation énergétique comme critère d’évaluation d’une performance et de pilotage des projets, sachant que le confort ou la qualité de l’air sont tout aussi essentiels.

Malheureusement, le GTQE déplore encore un certain nombre de freins au développement de cette méthode :

 
  • Le cahier des charges de l’opération au stade de la programmation reste généralement peu qualitatif, sans spécifier le niveau de performance attendu en exploitation ;
  • Le facteur qualité est ainsi souvent laissé de côté par les maîtres d’ouvrage, en se satisfaisant d’obligations de moyens et non pas d’obligation de résultat ;
  • Enfin, trop peu de moyens techniques, méthodologiques et financiers s’avèrent disponibles pour atteindre les objectifs ambitieux en exploitation du fait de l’absence d’analyse des coûts liés à la non-qualité.

Par ailleurs, si l’on constate que le coût du commissioning complet d’un bâtiment neuf représente environ entre 0,6 et 1 % du coût total de l’opération (incluant les coûts de la maîtrise d’ouvrage, de la maîtrise d’oeuvre et de la construction2), le temps de retour sur investissement s’évalue entre zéro et dix ans, selon le type de gains compris (les consommations d’énergie seules ou bien l’ensemble des gains directs et indirects). Précisons de plus que ces données peuvent varier en fonction de la complexité de l’opération et du périmètre de la mission de commissioning. En revanche, la baisse des non-qualités impliquera de facto une réduction notable des coûts internes (détection, correction, prévention…) comme des coûts externes, souvent supportés par le client (baisse de productivité, utilisation d’équipements de secours, surcoût liés aux consommations énergétiques, insatisfaction, perte de renommée…). Rappelons à ce titre qu’une étude du Lawrence Berkeley National Laboratory3 estime que si les gains en économie d’énergie s’échelonnent de 0,21 à 2,05 $/m², les gains indirects (économies en travaux modificatifs ou curatifs, coûts de maintenance…) peuvent s’élever jusqu’à 74,9 $/m² !

 

Suite aux dernières actions de concertation autour de la RE2020 et à l’heure où toutes les exigences énergie carbone ne sont pas encore fixées, le GTQE milite activement sur 4 fondamentaux à respecter pour une RE2020 garante d’une qualité de l’enveloppe.

  • La RE2020 doit être ambitieuse pour atteindre les objectifs de la Stratégie Nationale Bas Carbone, avec une exigence toute particulière sur l’indicateur Bbio positionnée à RT2012-40%. Le niveau moyen des bâtiments collectifs produits entre 2012 et 2018 présente un Bbio RT2012-20%, une RE2020 avec une exigence de Bbio à RT2012-10% représenterait un recul.
  • La consommation d’énergie primaire (Cep) doit être équivalente à : standard RT 2012 - 20 %
  • Il est nécessaire de traiter correctement les ponts thermiques. L’aspect doit être non dérogatoire au risque que le recours à la dérogation ne devienne systématique. Les avantages du traitement des ponts thermiques ne se limitent pas seulement à lutter contre le risque de condensation. Ils engendrent diminution des consommations énergétiques, des charges de chauffage, des émissions de GES, tout en améliorant le confort été comme hiver, la qualité de l’air et, enfin, la prévention des sources de désordres structurels.
  • Il devient nécessaire d’actualiser les bibliothèques des outils de calcul réglementaire. En effet, les performances thermiques ayant évolué favorablement avec des résistances thermiques des parois courantes en hausse, l’influence des ponts thermiques devient prédominante.

 

LES MEMBRES DU GROUPE DE TRAVAIL SUR LA QUALITE DE L'ENVELOPPE